samedi 24 novembre 2012

Presse : Le progrès - Septembre 2005


Vu sur le www.progres.fr ( 23 septembre 2005) : Noir Désir : retour vers le passé

S. Guiochon
Alors que Bertrand Cantat purge sa peine à Muret (Haute-Garonne), le groupe publie un album enregistré en concert lors de la dernière tournée de Noir Dez Enregistré dans des grandes salles, avec plus de 5000 personnes à chaque fois, le disque de Noir Désir reflète une intimité musicale étonnante
L'affaire « Cantat-Trintignant » a laissé Noir Désir en suspens. Au delà des aspects dramatique et judiciaire, ce triste fait divers a coupé l'herbe sous le pied d'un collectif, dont les trois quarts des membres étaient tout à fait étrangers au drame de Vilnius. Fin juillet 2003, pendant le fameux tournage de « Colette», le guitariste, le bassiste et le batteur de Noir Désir, étaient à Bordeaux, en train de peaufiner un disque « live » issu de leur récente tournée 2002-2003.
Dès l'annonce du drame, les trois musiciens ont mis de côté leur projet musical, pour venir assister leur ami. Sans jamais s'impliquer dans aucune polémique, sans absoudre Bertrand Cantat, ils ont fait le chemin de Vilnius, d'abord « pour essayer de comprendre», ensuite pour être simplement présents. Avec la famille Cantat, ils ont suivi l'instruction, puis le jugement du chanteur, jusqu'à son rapatriement en France. Alors que l'affaire est judiciairement terminée (aucun appel n'a été interjeté), le groupe et sa maison de disques (Barclay, groupe Universal) ont choisi de redonner vie au projet d'album live, qui était décidé dès le début de la tournée 2002.
Pour un tel projet, il faut faire des choix. Ecouter les bandes enregistrées au fil des soirs, sélectionner telle chanson, telle version. Avec leur ingénieur du son, les trois musiciens ont dégrossi le travail. Puis obtenu du ministère de la justice deux après-midi de travail à la prison de Muret. « C'était très émouvant, d'être réunis tous les quatre et d'écouter les bandes de Noir Désir », a expliqué le batteur Denis Barthe au mensuel « Rock & Folk ».
Alors que leur premier live, « Dies Irae», avait été enregistré en un seul soir au Transbordeur de Lyon-Villeurbanne, ce disque est une compilation de différents concerts. Mais dans les deux cas, aucun instrument n'a été ajouté ou rejoué. « On a même laissé des erreurs, parce que ça fait partie d'un concert de rock », expliquent les membres du groupe.
Enregistré dans des grandes salles, avec plus de 5000 personnes à chaque fois, le disque de Noir Désir reflète une intimité musicale étonnante. Plutôt que de capter le son de la salle, le groupe a privilégié le son des retours. On écoute donc sur le disque ce que les musiciens de Noir Désir entendent sur scène. La voix de Bertrand Cantat est notamment très en avant. Tout le disque rappelle combien Noir Désir était un grand groupe de scène, et que l'affaire Vilnius est également un gâchis artistique.
Thierry Meissirel
> NOTE
Noir Désir en public (double cd) et Noir Désir en images (double dvd). Barclay/Universal

Un groupe unique en France
« Noir désir » représente un cas à part dans l'histoire du rock français. Depuis les années cinquante, les frenchies se sont essayés au rock, avec des bonheurs divers, sans jamais atteindre l'équilibre parfait des Bordelais. La première génération s'était contentée de copier les pionniers. Les années soixante et soixante-dix ont connu de belles réussites (Variations, Trust, Téléphone). Mais personne n'a résolu l'équation « intégrité artistique plus réussite commerciale » avec autant d'efficacité que l'équipe de Bertrand Cantat.Dans le milieu assez fermé du rock et du show-biz, l'affaire Cantat a surpris des gens qui n'ont pas l'habitude de s'étonner des excès. Arrogance, produits illicites et autres inconséquences sont plus ou moins admises. « On peut tout faire tant qu'on vend des disques », résumait Marianne Faithfull dans son autobiographie.
Mais Noir Désir, c'était tout le contraire de cela. Ils ont vendu des disques (« 666.667 Club » en 1996 et « Des visages, des figures » en 2001 ont atteint le million d'exemplaires), mais cette réussite commerciale leur a permis de défendre farouchement leur indépendance artistique. Ainsi Bertrand Cantat et son quatuor ont toujours refusé la « promo » telle qu'on la conçoit dans les maisons de disques. « Pas question d'aller chez Foucault, ou sur les plateaux des 20h30 », ont expliqué les musiciens à la maison Barclay.
L'indépendance et l'intégrité de Noir Désir a parfois donné des Bordelais une image de jansénistes austères. Mais c'est sur scène que le groupe offrait son vrai visage. Les seuls excès connus de Bertrand Cantat, avant « l'affaire », était la frénésie et le jusqu'au-boutisme de ses prestations.
T.M.


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